Je me suis souvent demandé pourquoi les économistes comparaient la dette d’un pays à son « PIB » c’est-à-dire la somme des richesses produites en un an dans l’ensemble du pays (Le « Produit Intérieur Brut », c’est l’addition des « valeurs ajoutées » de toutes les activités économiques d’un pays). Dans nos collectivités locales, la dette est plutôt comparée à l’Epargne Brute c’est-à-dire ce que dégage le budget de fonctionnement pour financer le budget d’investissement et l’emprunt, ou bien à l’Epargne nette, c’est-à-dire ce qui reste une fois que l’annuité de la dette est payée… Pourquoi donc comparer la dette au PIB ?

Sans doute pour l’apprécier de manière relative. En effet, pour les comparaisons internationales, afin d’évaluer l’ampleur d’un déficit ou d’une dette, il faut la ramener à des valeurs qui dimensionnent la taille de l’économie du pays. Ainsi, en valeur absolue, la dette de la Grèce sera toujours inférieure à celle de l’Allemagne, mais en valeur relative, comparée au « PIB », elle est beaucoup plus inquiétante… Comparer une « dette » au « PIB » permet de relativiser les choses.

Ensuite, aussi, parce que le PIB, est un indicateur si l’on veut porter un jugement :

  • sur la taille du secteur public par rapport à l’ensemble de l’économie. En France, l’ensemble des dépenses publiques (État, collectivités locales, Sécu) représentent 55% du PIB, soit plus de la moitié de la richesse nationale, et les recettes 45%. Cela signifie que quasiment la moitié de la richesse nationale est redistribuée entre les Français, on est loin de « l’ultra-libéralisme » dont nous affuble les « ultra-communistes » français (les derniers du monde) !
  • sur la capacité d’un État de rembourser ses dettes. On considère implicitement que le PIB est le potentiel économique qui « garantit » la dette publique. Ce sujet mérite, selon moi, d’être revu, car le PIB contient les salaires, les amortissements, les intérêts d’emprunt, … Si un Etat le décidait, il ne pourrait pas prélever la totalité du PIB, car cela reviendrait à ne plus payer les salaires, à ne plus investir, …

Comparer la dette d’un pays à son PIB est, selon moi, un indicateur, mais ne saurait être un compteur ou un tableau de bord. On le voit bien aujourd’hui. L’indicateur suffit quand tout va bien. Mais quand la crise pointe son nez, il ne suffit pas à gérer !

Le cas de la Grèce conduira probablement à ce que l’on affine cette analyse. En effet, il apparaît que, pour des raisons politiques et administratives l’Etat Grec ne peut pas faire payer aux citoyens des impôts supérieurs à 15% du PIB – une proportion que l’on rencontre généralement dans les pays en voie de développement. Ajoutons à cela qu’il y a, dans certains pays une économie « bis », un « black-PIB ». Et puis, dans certains pays, comme la France, le PIB est surtout constitué de prélèvements obligatoires… Comparer la dette au PIB, quand le PIB est saturé de prélèvements n’a pas de sens… Même si cela est un bon indicateur de délocalisation possible –probable- de l’économie d’un pays. Le « taux de saturation du PIB » devient alors un indicateur de la pression qui incite de nombreuses entreprises à aller faire du PIB ailleurs !

Dans l’immédiat et en temps de crise, je propose que l’on compare la dette d’un Etat au volume de son budget – la somme des recettes, la somme des dépenses-, comme nous le faisons dans nos collectivités locales. A la différence que nos collectivités locales peuvent inscrire les emprunts en recettes –pour équilibrer le budget et financer l’investissement- tandis que l’Etat, lui, n’a pas le droit de la faire. Il y a peut-être là, une règle à revoir : imposer à l’Etat l’équilibre de son budget, certes, mais en y intégrant l’emprunt et la gestion de la dette.

Quant à l’Europe, elle n’a pas le droit d’emprunter… même pour financer ses dépenses d’investissement ! Ce qui est pour le moins incongru ! Le budget Européen n’est jamais en déficit, et pour cause ! A titre d’exemple, en 2010, sur un budget d’environ 126 milliards d’€uros, l’Europe va rembourser aux Etats-membres 4,5 milliards d’excédents de gestion. Une telle rigueur est d’ailleurs idiote : il faudrait traiter l’U.E. comme une collectivité locale, en lui permettant d’avoir une section d’investissements. Mais, pour l’instant, tous les Ministres du Budget s’y opposent … L’Etape suivante serait que l’Europe ait une fiscalité propre : une taxe de « convergence sociale et fiscale » ? Une taxe sur les flux financiers ? Une taxe Carbone ? L’Europe pourrait ainsi constituer une épargne et disposer d’un fonds souverain. Tout cela renforcerait notre monnaie et lui donnerait du sens, tout comme la nomination d’un Ministre Européen des Finances.

Je pense que le Premier Ministre Européen des Finances pourrait être Alain Lamassoure, l’actuel Président de la Commission des Budgets au parlement Européen.

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