Européennes 2014 : dernier coup de semonce !

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Hier soir les électeurs de France ont adressé à nos gouvernants un « dernier coup de semonce ». Le coup de semonce est un usage dans la marine. C’est le tir de canon qui tombe à côté du bâteau comme pour dire « cette fois c’est à coté, mais la prochaine fois, ce sera dans le mille »… Le bâteau ainsi visé sort alors son pavillon et ce dernier tir de sommation doit aboutir à l’ouverture de pourparlers !

Par ce vote, le peuple de France pratique de la sorte et demande l’ouverture de pourparlers à nos dirigeants. Si nos gouvernants n’entendent pas, alors, le score du FN aux élections régionales, puis à la Présidentielle de 2017 risque fort d’être un « 21 avril à l’envers », avec le FN en tête des suffrages le soir du 1er tour.

Comment en sommes nous arriver là ?

Les électeurs de gauche sont venus grossir les rangs de l’abstention. Pour certains, de plus en plus nombreux, ils ont voté FN.

Le parti socialiste, pendant la campagne des présidentielles a nié la crise. François Hollande a laissé croire aux électeurs, que le problème était Nicolas Sarkozy et l’UMP, alors qu’en l’espèce, et sur de très nombreux sujet, ils étaient la solution. Après avoir diabolisé l’UMP pendant cinq années, décrédibilisé son action, refuser la main tendue et l’unité nationale, le PS a finalement reconnu la crise, renié son propre programme, et tourné le dos à son électorat, le poussant à se réfugier dans le seul vote « utile » qui lui restait, le vote FN.

Marine Le Pen a mis en place une stratégie redoutable en globalisant son opposition envers «l’UMPS »…

Face à la crise les degrés de liberté se réduisent, le chemin à emprunter se rétrécit. La politique à mener dépasse les étiquettes partisanes. En faisant élire François Hollande d’une part, et en arguant que UMP et PS faisait la même politique d’autre part, Marine Le Pen a tendu un piège dont la 1ère mâchoire s’est refermé lorsque le Président de la République a signé le traiter européen de stabilité, après avoir dit pendant sa campagne qu’il allait « changer l’Europe », la seconde s’est refermée en janvier dernier, lorsque le Président a fait une 2nde volte face, et la troisième mâchoire s’est refermée sur la République, après les municipales avec le discours de politique générale du nouveau 1er Ministre. Marine Le Pen n’avait plus qu’à dire « CQFD » !

Désormais, quelque soit le parti au pouvoir, Marine Le Pen peut poursuivre son travail de sape et d’opposition. Laissant imaginer à l’électorat que droite et gauche mènent la même politique, et que la seule alternative possible, c’est le Front National. Ce faisant elle suit un chemin identique à celui tracé par Bénito Mussolini en son temps, à la différence près que Mussolini parti de l’extrême gauche, avait pris d’assaut le PS Italien, puis tendu la main à l’extrême droite, tandis que Marine Le Pen tente de fonctionner à contre sens.

Pour recruter dans toutes les cases de l’échiquier, elle est en train de convaincre petit à petit les électeurs, de gauche et de droite, qu’il y a au fond « un responsable à la situation » : « les immigrés et l’immigration ». C’est odieux, c’est vieux comme le monde mais en période de crise, la recette a fonctionné et fonctionnera encore. C’est un discours déculpabilisant : « Vous n’y êtes pour rien, si nous en sommes là c’est de la faute de l’UMPS et de l’immigration ! »

Dire que nous avons construit l’Europe pour nous protéger du fascisme, de la xénophobie et du communisme… Et voilà que c’est par un scrutin Européen que ces thèses reviennent sur le devant de la scène. Voir que les jeunes et les travailleurs sont les 1ers électeurs du Front National, c’est pour moi un véritable cauchemar.

Face à ce mensonge qui contient en germe de nouveau génocides, nous devons opposer un démenti formel et tenir bon. Nous devons avoir le courage de dire « non » !

L’UMP engluée dans ses affaires, divisée depuis trop longtemps ne s’est pas intéressée à ces élections européennes.

Elle a investit officiellement ses listes le 29 avril 2014, il y a seulement quelques jours… Elle a nommé dans la plupart des circonscriptions des têtes de listes qui ont découvert l’Europe à l’occasion de cette campagne. « Des copains du Président », souvent sans légitimité, à la recherche d’un « poste ». Quand ce n’était pas le cas, c’est l’image que cela a donné. Les deux candidats légitimes Alain Lamassoure et Alain Cadec, euro députés sortants, sont les seuls, dans leur circonscription, à être arrivés en tête (dans l’Ouest et en Ile de France). Ils parlaient d’Europe quand d’autres parlaient de la France. En Aquitaine où Alain Lamassoure était un euro député connu et reconnu depuis 15 ans, on l’a déraciné pour le remplacer par Michèle Alliot-Marie… avec le résultat que l’on sait !

L’administration Française, depuis des lustres, se sert de l’Europe comme bouc émissaire de ses errements !

Je me souviens de cette visite d’un élevage laitier à Peujart, en Gironde, il y a quelques années. La ferme avait été rachetée par un jeune couple d’agriculteurs Hollandais. Lors de la visite, de nombreux agriculteurs Girondins regardaient circonspects les installations… L’un d’eux dit, « ce n’est pas aux normes »… « Bien sûr que si » répondu le technicien présent… « Pourtant ce n’est pas ce qu’on nous fait faire ici » dit l’éleveur. « Non », répondu le technicien. « Ce n’est pas ce qu’on vous demande ici, mais c’est aux normes européennes… ». Y aurait-il en France des « normes européennes » différentes que dans toute l’Europe ?

Je me souviens de ce combat mené dans les années 2000 pour défendre la culture des vignes en « Vignes Hautes et Larges »… L’INAO affirmait que l’augmentation de la densité de plantation était « imposée par Bruxelles »… Jusqu’à ce qu’un viticulteur Allemand nous apporte un article montrant que l’Europe finançait en Rhénanie-Palatina la diminution des densités de plantation … L’administration Française se servait de l’Europe comme épouvantail !

Cet agriculteur enfin, a qui on a refusé les aides de la PAC parce qu’il n’avait pas « coché la bonne case » sur son dossier… Un critère bien Français nullement imposé par l’Europe…
Quelques exemple parmi d’autres, qui montrent que trop souvent, l’administration française fait porter le chapeau à l’Europe !

Quand on dit « oui » c’est grâce à la France, grâce au département, grâce à la Région… Quand on dit « non », c’est à cause de l’Europe ! Il ne faut donc pas s’étonné le moment venu, que les français questionnés disent « non » à l’Europe !

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L’Europe, certainement, peut faire des progrès dans sa construction et dans sa communication…

L’Europe a poussé bien vite, trop vite. Elle a mis en place une monnaie unique, sans se préoccuper de la politique monétaire commune qui l’accompagne. L’Europe qu’on espérait entendre sur le sujet des affaires étrangères, est restée désespérément muette… L’Europe qu’on attendait sur le sujet de la défense et de l’énergie, depuis tellement longtemps, et que l’on attend toujours… L’Europe est « désincarnée » alors qu’on aimerait lui donner un visage pour la rendre plus humaine.

L’Europe que l’on attend sur un sujet qui préoccupe les Français : l’immigration.

Quelle est la politique Européenne de l’immigration ? Comment, tous ensembles, organisons-nous l’espace « Schengen » ? Comment aidons-nous les pays d’où viennent les émigrés à régler leurs conflits, à sortir de la misère, à se protéger des famines ? Comment agir ensemble avec l’Europe sur les causes de l’émigration, plus que sur les flux de l’immigration ? Par exemple, ce que nous avons fait en Europe pour mettre fin à la guerre ne peut-il pas être fait de la même manière, en Afrique, En Syrie, en Thaïlande, et partout où il y a des conflits pour construire la paix? Les images venues de Lampedusa, de Calais, inquiètent les Européens, les Français. Comme le disait Carlos Orsoni le Maire de Venise , en Visite à Bordeaux il y a quelques jours : les frontières de l’Italie sont désormais nos frontières communes.

Le mode de scrutin laisse trop de place aux partis et pas assez aux territoires !

Si l’on veut que l’Europe s’incarne dans des femmes et dans des hommes, alors il ne faut pas tourner autour du pot : il faut un candidat par territoire ! J’entends l’argument de ceux qui disent « mes idées mon parti ne sont pas représentées »… Très bien. Mais dans un scrutin à la proportionnelle, ce sont les territoires qui ne sont plus représentés. Dans notre constitution, les partis politiques sont chargés « d’animer la vie politique », pas de la capter, pas de spolier les citoyens ! Ces élections européennes, il faut bien le dire ont été un concours de parachutage ! Hors, un gage de la stabilité, c’est d’avoir des élus sur chaque territoire. C’est vrai pour l’Europe, c’est vrai pour les Régions. J’ai toujours préféré les géologues aux idéologues et les paysans aux partisans. Un élu doit être ancré à son territoire plus qu’à un parti politique. La démocratie en sortira grandi. La légitimité d’un élu, sa liberté, c’est d’être élu par le peuple ! Je ne suis pas choqué qu’un parti n’ait pas de représentant ici ou là. Je serai choqué qu’un territoire n’en ait pas.

Les médias ne se préoccupent de l’Europe que depuis dimanche soir

Tout y passe : le parlement, la commission, le conseil de l’Europe… En quelques heures, les médias ont mis le cap sur l’Europe… mais quelques heures trop tard !

Nous, les français, l’électorat… nous sommes plus souvent mécontents que contents, nous voyons la bouteille à moitié vide, plutôt que la bouteille à moitié pleine…

Nous zappons de plus en plus… La politique nous passionne : la politique façon « Je t’aime moi non plus » où « va, je ne te hais point », la politique « kleenex que l’on jette », la politique « presse citron » … « Comment imaginer que ceux-là même qui l’ont élu, après seulement quelques mois s’en détourne ? » C’est une question que l’on peut se poser souvent, en France. Comment imaginer qu’un Président de la République puisse réformer la France, s’il n’est pas soutenu par ceux qui l’ont élu ? C’est pourtant une constante : tous les Présidents de la 5ème république ont fait les frais de cet abandon du peuple. Et pour accentuer cette habitude détestable, tous les ans, la République organise un scrutin qui devient à chaque occasion un referendum national ! Comment gouverner dans ses conditions ? Notre agenda électoral n’aide pas nos gouvernants.

Depuis de trop longues années, les gens qui nous gouvernent qui n’entendent pas le message des classes laborieuses : le raz le bol de ceux qui se sont reconnus dans le discours sur « la fracture sociale » (1995…), le raz le bol de ceux qui se lève « tôt le matin » (2007), le raz le bol de ceux qui voulait « travailler plus pour gagner plus » (2007), la désespérance de ceux qui ont cru que « l’ennemi c’est la finance » (2012)… On ne badine pas avec ces sujets là !

  • On ne peut pas dire d’un coté que la croissance vient du travail, et de l’autre, dévaloriser constamment le travail et laisser le SMIC se rapprocher dangereusement des minima sociaux ;
  • On ne peut pas dire que l’objectif c’est l’emploi, la croissance, la remise en route de l’ascenseur social et en permanence tirer tout cela vers le bas : geler les salaires, créer des seuils qui dissuadent les employeurs d’augmenter leur salarié, qui dissuadent les entreprises d’embaucher, quand il faudrait au contraire les aspirer vers le haut ;
  • On ne peut pas dire que nos entreprises doivent créer de l’emploi, et de l’autre, augmenter chaque jour le coût de l’emploi pour l’employeur.
  • On ne peut pas dire que l’important c’est le pouvoir d’achat et augmenter toujours plus les charges salariales et les impôts qui pèsent sur les salaires;
  • On ne peut pas d’un coté travailler avec succès sur l’allongement de la vie, des études plus longues, et dans le même temps, demander aux salariés et à leurs employeurs de financer seul ces progrès ;
  • On ne peut pas afficher au fronton de l’Europe que la concurrence soit « libre et non faussée » et ne rien faire pour stopper les concurrences insurmontables dont les entreprises françaises sont l’objet.

Les agriculteurs, les commerçants, les artisans, les petits patrons, ont l’impression de travailler toujours plus, pour ne gagner toujours rien… et de consacrer leurs seuls investissements à la « mise aux normes » ! Ils sont concurrencés matin, midi, et soir par des entrepreneurs d’ailleurs, qui n’ont pas les normes sociales qu’on leur impose… En France, les usines ferment et les « zones commerciales » explosent un peu partout, pour vendre des produits fabriqués ailleurs.

Comment le dire à nos dirigeants ? Nombre d’entre eux ont voté FN pour que le message passe, pour dire qu’ils n’y arrivent plus. Mais l’ont-ils bien compris ? Cette fois, l’ont-ils entendu ?
Les citoyens, ne comprennent pas que quand l’Etat dise « faire des économies », alors que ses dépenses augmentent… Ils ne comprennent pas que le déficit se mesure en « % du PIB » et non en « % du chiffre d’affaire ».

Pour que les citoyens et les élus du peuple puissent parler, pour qu’ils se fixent des objectifs communs, encore faut-il qu’ils aient les mêmes tableaux de bord.

On n’arrive pas à joindre les deux bouts avec un SMIC… En France, le SMIC est de 1000 € mais avec 1000 € on ne vit pas. Et puis, ce n’est pas tout à fait vrai de dire que le SMIC est de 1000 €… Dans les faits il est plutôt de 500 €… car c’est la différence qu’il y a entre les revenus de quelqu’un qui a un boulot (35 heures par semaine) et de quelqu’un qui n’en a pas.

Va-t-on laisser encore longtemps notre appareil de production s’en aller en expliquant que notre vocation à nous c’est l’innovation, les nouvelles technologies et les métiers du service ? Tout le monde a l’air enfin d’accord pour dire que l’industrie s’en va, que l’agriculture ne va pas… Que le SMIC n’est pas assez élevé pour le salarié, mais qu’il est trop élevé pour l’employeur, que nos produits sont trop chers, qu’ils ne sont plus compétitifs…

Mais au lieu de prendre le taureau par les cornes, pour permettre aux français de continuer à consommer avec leur salaire, on va fabriquer ailleurs dans des zones ou les charges et les salaires sont plus bas… Est-ce qu’on appelle « le modèle français » ?

En 2007, l’Allemagne a fait de nombreuses réformes pour mettre fin à ce système : elle a notamment mis en place pour cela la TVA SOCIALE : moins de charge sur les salaires, plus de TVA sur les produits. Le résultat : des produits allemands sont plus compétitifs en Allemagne, et à l’Export… Cette réforme, nous ne l’avons pas faite… Le résultat, c’est qu’aujourd’hui, un agriculteur français est concurrencé en France par un agriculteur Allemand : le lait, la viande, le fromage … Et lorsqu’il exporte en Allemagne, il paye la TVA Sociale en Allemagne, après avoir payé les charges sociales en France…

Alors c’est vrai qu’il y a de nombreuses raisons de voter « contre » et de dire « non ». Mais il y a aussi de vraies raisons de dire « oui » à l’Europe ! De dire « oui » et de soutenir ceux qui dans les partis veulent réformer la France : réduire la dette, relancer la croissance, retrouver des raisons d’espérer. Et je ne vois rien dans le programme du FN qui aille dans ce sens.

Les pères fondateurs de l’Europe ont commencé par mettre en commun le charbon et l’acier. Ce qui servait à fabriquer les armes et à nourrir les conflits, ils l’ont mutualisé… pour investir dans l’avenir.

Ce faisant ils réalisaient un rêve formulé par Victor Hugo un siècle plus tôt lors du discours d’ouverture du Congrès de la paix, le 21 août 1849 :

« Ces cent vingt-huit milliards donnés à la haine, donnez-les à l’harmonie ! Ces cent vingt-huit milliards donnés à la guerre, donnez-les à la paix! Donnez-les au travail, à l’intelligence, à l’industrie, au commerce, à la navigation, à l’agriculture, aux sciences, aux arts, et représentez-vous le résultat. Messieurs, je le dis en terminant, et que cette pensée nous encourage, ce n’est pas d’aujourd’hui que le genre humain est en marche dans cette voie providentielle. Dans notre vieille Europe, l’Angleterre a fait le premier pas, et par son exemple séculaire elle a dit aux peuples: « Vous êtes libres ». La France a fait le second pas, et elle a dit aux peuples: « Vous êtes souverains ». Maintenant faisons le troisième pas, et tous ensemble, France, Angleterre, Belgique, Allemagne, Italie, Europe, Amérique, disons aux peuples: « Vous êtes frères »! »

Nous sommes libre, nous sommes souverains, nous sommes frères ! Ne l’oublions pas et avançons ensemble en France, en Europe et dans le Monde.


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2 commentaires sur “Européennes 2014 : dernier coup de semonce !”

  1. En tant que marin je connais bien cette pratique…
    Le tir de semonce est suivi du tir d’arrêt avant le tir au but!

    Il faut noter que le tir au but est ordinairement fait sur les oeuvres mortes.

    Bon carénage.

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