Intervention d’Yves d’Amécourt,
Conseiller Général de Sauveterre de Guyenne
Dans le cadre du vote du budget primitif 2006
en séance plénière au Conseil Général de la Gironde le jeudi 15 décembre 2005.
Monsieur le Président,
Chers Collègues,
Nous nous réjouissons que le département de la Gironde s’implique, enfin dans la filière bois.
Vous savez combien il est important de se préoccuper aujourd’hui, du développement durable de notre planète. Le développement durable, c’est un peu notre bon sens paysan. Les propriétaires de bois et de forêt le savent lorsqu’ils plantent un arbre, qui sera coupé dans deux générations ! L’entretien des bois et des forêts est un enjeu fondamental du développement durable sur notre planète, dans notre pays, dans notre département. Les forestiers, privés ou publics, furent les premiers à développer, il y a 4 siècles, le concept de développement durable des massifs forestiers.
L’entretien et la culture des bois et des forêts, c’est aussi le moyen de diminuer les gaz à effet de serre. En effet, les hommes et les animaux absorbent de l’oxygène et rejettent du CO2, les arbres et les plantes, eux, font le contraire : la nature est bien faite !
Il est donc un moyen de maîtriser les gaz à effet de serre, plus campagnard et moins urbain : c’est « l’absorption » par les plantes. Car, je le redis, si l’homme et les moteurs produisent du CO2, les plantes, elles, l’absorbent.
En effet, lorsqu’un viticulteur taille sa vigne et enfouit les sarments, ce sont à chaque kilo de sarments enfoui, quelques 100 litres de CO2 qu’il fait disparaître. Soit par hectare de vigne environ 300000 litres de CO2 par an. Il faut donc préférer l’enfouissement des sarments à leur brûlage en bout de rang.
La culture et l’utilisation des plantes est un bon moyen de participer à la maîtrise de l’effet de serre. Lorsqu’un menuisier ou un charpentier utilise 1 m3 de bois, ce sont presque 100000 litres de CO2 qui sont fixés pour des générations. Utiliser le bois dans les charpentes, dans les volets, dans les menuiseries, c’est participer à la réduction des gaz à effet de serre.
Couper un arbre quand il cesse de fixer le CO2, c’est à dire quand il est trop vieux et qu’il ne croît plus, c’est rendre service à l’atmosphère.
Tailler, enfouir, cultiver, composter sont autant de moyens positifs de maîtriser l’effet de serre…
Et le « bois-énergie », qu’est-ce que c’est ? : l’utilisation du bois, pour faire de la chaleur ! La gironde est le premier département viticole de France, c’est aussi le deuxième département forestier. Voilà 15 ans que les départements voisins, je veux parler de la Dordogne et des Charentes, se sont lancés dans la promotion du bois comme énergie. Ils l’ont fait à la suite de la Normandie, des Pays de la Loire… Voilà un sujet qui colle terriblement bien avec le développement durable : 1 tonne de bois utilisée, c’est du pétrole économisé, c’est 1 tonne de CO2 de moins rejetée dans l’atmosphère, c’est une diminution de l’effet de serre.
Qui plus est, la filière « bois- énergie », c’est trois fois plus d’emplois locaux que la filière pétrole ! Il s’agit de valoriser en énergie des bois qui aujourd’hui sont détruits car inutilisables : cimes des arbres, rémanents de coupe, déchets bio (palettes, ceps de vignes, carassons…)… Dans nos départements voisins, c’est le Conseil Général qui est le mettre d’ouvrage de ce programme.
En Gironde seul un syndicat intercommunal, le SIPHEM, Présidé par le Conseiller Général Honoraire Jean Pauly, se lançait dans cette étude de faisabilité… Le Conseil Général devait s’engager dans cette voie, voilà qui est fait… Mieux vaut tard que jamais !
En Charente, comme en Dordogne, une trentaine de réseaux de chaleur bois fonctionnent désormais. En Gironde, aucun réseau de chaleur n’existe.
Il ressort des expériences françaises que dans les régions où le « bois-énergie » se développe, on observe une forte implication des conseils généraux, tant en terme de conseil et d’accompagnement des maîtres d’ouvrage, qu’en terme de financement.
Nous voilà engagés, notre groupe soutiendra donc cette délibération.
Concernant les autre volets pour la filière bois, il vont dans le bon sens : le sens de la construction de véritables filières :
- comment développer la sylviculture du Robinier-faux-accacias, si dans nos écoles de menuiserie on continue d’apprendre à travailler les bois exotiques ?
- Comment développer l’utilisation du Robinier si l’on apprend pas à nos prescripteurs (acheteurs des collectivités, architecte, …) toutes les qualité de ce bois sans tanin, qui est le teck de l’europe occidentale ?
Ce que nous pouvons faire pour le Robinier, il faut le faire pour le pin, dont la notoriété spontanée n’est pas à la hauteur de ses nombreuses qualités…
Et puis, à l’heure où notre Entre Deux Mers souffre de la crise viticole, il faut se ré intéresser
- aux Châtaigners qui occupent les sols acides,
- les chênes pubescents,
- les chênes pédonculés dont l’association « Chênes du Sud Ouest » a montré l’intérêt pour le vin, alors que l’on croyait que seul le chêne sessile bonifiait nos productions,
- les charmes qui occupent les parties fraîches de nos paysages,
- le frêne,
- l’aulne glutineux, autrement appelé « vergne », dont on faisait autrefois les sabots, tant il est facile a travaillé et dur à l’épreuve !
- L’alizier
- et le cormier, bois rares, dont on fait les crosses des fusils tant ses caractéristiques mécaniques se rapprochent de celles de l’acier, et qui finissent trop souvent en bois de chauffage par manque de connaissance…
Oui nous approuvons cette délibération structurante pour notre filière bois : connaître les essences pour mieux les utiliser, créer de la valeur chez nous plutôt que de transporter des bois qui viennent d’ailleurs, utiliser le bois, les céréales aussi, comme énergie plutôt que d’importer du pétrole, favoriser le lien qui uni depuis des siècles l’homme et la nature. Développer l’artisanat et l’industrie locale.
Ne pas avoir peur de couper des arbres et de bien les utiliser. Lorsqu’un arbre vieilli, il faut laisser la place aux jeunes ! N’oublions pas que c’est en laissant pousser les glands que l’on fait des grands chênes … N’oublions pas non plus que rien ne pousse à l’ombre des grands arbres. Un jour vient ou le vieux chêne doit être coupé pour laisser l’énergie de la lumière faire grandir les baliveaux qui sont sous son houppier.
Pour finir je dédie cette citation de Charles Baudelaire, à Yves Lecaudey :
« La nature est un temple ou de vivant piliers
laisse parfois sortir de confuses paroles.
L’homme y passe à travers une forêt de symboles
qu’il observe avec un regard familier »…