Régionales 2015 : Hier après-midi je représentais Virginie Calmels à la maison éco citoyenne de Bordeaux lors d’une conférence/débat organisée par Bio d’Aquitaine, Agrobio Poitou-Charentes et les 3 Gab du Limousin sur le thème « Quelle sera la politique agricole et alimentaire bio de la future grande région Aquitaine-Poitou-Charentes-Limousin » ?
Autour de la table José-Manuel Boudey (Parti Fédéraliste Européen), Françoise Coutant (EELV) et Alain Rousset (PS), président sortant de la Région Aquitaine.
Disposant de 7 minutes d’exposés, sur 3 heures de réunion, j’ai délivré une partie seulement de notre message. Le voici in extenso.
Deux questions nous étaient posées.
1/ Afin de répondre aux enjeux sociétaux de développement d’une économie sociale et solidaire et d’une agriculture permettant la protection forte de l’environnement et de la santé des populations, quelle place donnerez vous à la bio dans votre projet agricole et alimentaire pour la grande région de demain ?
Aujourd’hui, la Région Aquitaine, la Région Poitou-Charentes et la Région Limousin ne brillent pas par leur originalité dans le domaine du soutien à l’agriculture d’une part, et de l’agriculture biologique d’autre part.
Une fois que l’on a retiré les aides qui sont gérées par la Région mais imposées par le contrat de plan Etat-Région d’une part, et l’Europe d’autre part, il ne reste pas grand-chose.
C’est bien dommage !
Quelques chiffres clés sur la grande région :
- 4,2 millions d’ha de SAU
- 83 100 exploitations agricoles (3945 en bio)
- 130 000 emplois
- 11 milliards d’euros de chiffre d’affaire
- 155 signes officiels de qualité
Une Région « porte parole »
- La 1ère Région Agricole d’Europe doit être un interlocuteur pour influer sur les politiques européennes pour l’agriculture en générale, les signes de qualité, l’agriculture raisonnée, l’agriculture biologique !
- La 1ère Région Agricole d’Europe doit s’élever contre la distorsion de concurrence qu’il y a notamment entre la France et l’Allemagne : rendez-vous compte qu’aujourd’hui on importe du fromage d’Allemagne, on importe du lait, que 80% de la viande consommée en Aquitaine vient d’Europe du Nord ! Alors que nos veaux sont exportés en Italie et en Espagne ! Allez sur le marché d’Agen pour écouter les transactions et la langue des acheteurs ! Si nous voulons des agriculteurs Bio heureux, il faut d’abord que nous ayons des agriculteurs heureux ! En 2007 l’Allemagne a fait le choix de la TVA Sociale, pas la France : le résultat est qu’aujourd’hui les agriculteurs Français lorsqu’ils exportent en Allemagne (notre 1er client en Europe) payent les charges sociales en France et la TVA sociale en Allemagne… Tandis que les Agriculteurs Allemands eux sont exonéré d’une partie des charges en Allemagne et exportent hors taxe en France !
- Une pomme c’est 70% de main d’œuvre en agriculture traditionnelle et beaucoup plus en agriculture biologique. La question du coût de la main d’œuvre pour l’employeur, la question des charges sociales est une question stratégique en agriculture biologique !
- Le Bio en France c’est 5 Milliards d’€ de chiffre d’affaire… Mais nous importons 30% de notre consommation !
- La 1ère Région Agricole de France ne peut pas rester indifférente au malheur des agriculteurs qui bossent pour rien ! Et qui, quand ils gagnent leur vie, quelque soit la filière, gagnent très peu par rapport à leur investissement personnel et à leur investissement financier !
- En 2004 j’ai écris dans Sud-Ouest une tribune libre qui s’intitulait : « Commerce équitable, agriculture durable » c’était un appel à organiser les filières dans le vin, dans le lait, … pour permettre d’avancer ensemble, de gagner plus en raisonnant du producteur au consommateur, d’augmenter les marges globales et de mieux les répartir ! Là est le rôle du politique ! Et quand le politique ne s’implique pas dans la création de filières structurées on va de crise en crise … On joue les pompiers en permanence, on se penche sur le lit des agriculteurs mourants ! Car on arrive le plus souvent après la bataille ! Le préventif est toujours meilleur que le curatif, les agriculteurs le savent bien, il faut l’apprendre aux élus ! Il faut structurer nos filières ! Ramener de la valeur ajoutée dans la Région ! Qui dit Valeur Ajoutée dit retombées pour tous !
- Structurer les filières s’est disposer d’outil de transformation et de distribution (plateformes …) !
- Il faut sortir de ce discours de la grande distribution du « toujours moins cher » ! On ne créer pas de la croissance et de l’emploi en France en visant le « toujours moins cher » ! Virginie Calmels organisera des tables rondes avec les acteurs de la grande distribution ! La construction des marges commence au plus proche du consommateur, donc avec les distributeurs ! la qualité a un prix ! Cela doit être le message de la nouvelle Région !
- Parmi les filières agricoles il y a la filière « agriculture biologique » : il convient de la faire croitre sans casser l’équilibre du marché ! « Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel » Certains veulent multiplier les agriculteurs bio pour faire baisser les prix (par le marché). Ce n’est pas un processus convenable car chacun sait que les prix de revient en agriculture biologique sont plus élevés que dans l’agriculture traditionnelle. Il faut donc permettre l’installation et le maintien en cohérence avec la progression du marché. L’objectif pour développer la filière est que chacun gagne bien sa vie. Aujourd’hui ce n’est pas toujours le cas. J’ai vécu la une crise viticole de 2002 à 2008, due à l’augmentation de la production. J’ai vécu la seconde crise, celle due à la baisse de la consommation de 2008 à 2012… Puis j’ai vécu la 3ème crise, celle du climat en 2012, 2013, … la coulure … et 2014, la grêle ! A chaque crise viticole, les viticulteurs bio ont été touchés comme les autres ! La Région doit organiser ses filières pour les protéger !
- L’assurance récolte est un sujet pour la Région ! Les aides européennes ne dureront pas éternellement ! Nous devons trouver d’autres principes comme l’on fait les forestiers avec leur compte-épargne-assurance-défiscalisé. La 1ère Région agricole d’Europe doit mettre en place les groupes de travail sur ce sujet et proposer des solutions au gouvernement et à l’Europe.
- Les objectifs du Grenelle (initié par Alain Juppé et accompli par Jean-Louis Borloo) : 6% de la surface agricole utilisée très loin d’être atteints en ALPC, comme en France, hors quelques régions pilotes : PACA : 7,1% en 2010 ; Languedoc-Roussillon : 6,2% et Corse 6,8% (mais problématique particulière de la Corse…)
- L’objectif national « Ambition bio 2017 » (succédant agriculture bio horizon 2012) : x 2 au moins les surfaces agricoles en 2017 par rapport à 2012, risque d’être un vœu pieux
Les présidents socialistes ont plus parlé du bio qu’ils n’ont agi. Ils se contentent d’appliquer les mesures de l’Etat et de l’Europe
Le 1er objectif de Virginie Calmels lorsqu’elle sera Présidente de la Région est
- de faire ne sorte que la Région soit le promoteur de la structuration des filières agricoles en général,
- des circuits courts bien sur pour développer notre agriculture,
- de l’agriculture familiale, qui est la forme la plus ancienne de l’économie sociale et solidaire,
- de la filière bio !
- Que la Région soit le défenseur de son agriculture au même titre qu’elle l’est pour l’aérospatiale, pour l’industrie. Ce n’est pas le cas aujourd’hui !
Or, aujourd’hui, le budget consacré à l’agriculture au Conseil Régional d’Aquitaine subi des baisses de crédits régulières depuis 4 ans –11%) notamment sur les aides à l’investissement (-23%) !
Le 2ème objectif de virginie Calmels est de mettre en place une gouvernance de l’agriculture dans la nouvelle Région.
Car tout cela ne pourra pas se mettre en place sans un changement de gouvernance avec le monde agricole. La Région n’est pas là pour créer des organismes, des labels, concurrencer les chambres, les interprofessions ou l’INAO … La Région doit, avec les organisations agricoles existantes, les chambres consulaires, les interprofessions, vos syndicats, avec les territoires, mettre en place des politiques efficaces, elle doit entrainer, elle doit suggérer, elle doit s’appuyer sur la société civile, pas se substituer à elle !
- Cette gouvernance elle doit s’organiser aussi avec les territoires dans le cadre des « contrat de pays » pour promouvoir les marchés de producteurs, les circuits courts, les AMAP, les « drive fermiers », les plateformes de distribution …
Prendre à bras le corps le sujet de la ressource en eau
- Il y a un enjeu énorme dont nous pouvons nous saisir ensemble : la gestion de la ressource en eau ! Sans eau, pas d’agriculture ! Il y a dans notre nouvelle Région des « petits déserts » en formation… Comment économiser l’eau des aquifères profonds en utilisant plus l’eau de surface ? Comment collecter et stocker l’eau l’hiver pour l’utiliser l’été ? Comment multiplier les solutions de traitement des eaux pour protéger les eaux des pollutions ? Quelle agriculture installer et promouvoir près des zones de captage ? Comment promouvoir et valoriser le captage d’eau en forêt ?
Investir dans la recherche
- Dans ce cadre général, les agriculteurs bio ont une mission particulière à remplir. Ils sont en quelques sortes « des laboratoires de recherche ». L’enjeu est de se servir des réussites de l’agriculture biologique pour permettre au plus grand nombre de progresser vers « moins de chimie », plus de « biologie », plus de « naturel »… Nous pouvons tous progresser ensemble ! Il y a encore en agriculture biologique des pesticides biologiques, des insecticides qui peuvent (doivent) être améliorés (la bouillie bordelaise, …). Il y a des techniques qui peuvent être transposées de l’agriculture biologique vers l’agriculture raisonnée, et de l’agriculture « raisonnée » vers l’agriculture. Il y a des techniques à faire évoluer pour utiliser moins d’énergie fossile. Je ne connais aucun agriculteur qui souhaite réduire ses achats en pesticide ! AUCUN ! Je ne connais aucun agriculteur qui n’aime pas la nature ! AUCUN ! Car la nature est la compagne des agriculteurs !
- Enfin, si on parle biologie, il y a en biologie une discipline qui actuellement n’est pas assez utilisée en agriculture et c’est bien dommage. Je veux parler de la génétique. Je veux parler des OGM. Je veux même parler des OGM « bio » ! Je m’explique … En viticulture nous nous battons toute l’année contre deux fléaux : l’oïdium et le mildiou. La plupart des pesticides que nous utilisons, y compris en agriculture biologique, sont destinés à cette lutte ! Or, nous avons identifiés des vignes, de la famille de la vigne, qui sont résistantes naturellement à l’oïdium et au mildiou. Un peu partout dans le monde on fait des croisements entre ses vignes et nos cépages nobles, le merlot, le cabernet sauvignon, … l’objectif est d’obtenir des plants qui soient résistants à l’oïdium et au mildiou tout en ayant les caractéristiques des cépages que nous utilisons. Nous savons tous que c’est possible … Mais dans combien de temps !!! Une fécondation + une plantation + une production + une répétition : nous ne serons pas prêts avant 40 ou 50 ans ! L’enjeu est important ! Pour ma part je souhaite que la Région soutienne la recherche dans ce domaine et que l’Etat autorise les expérimentations sur ce que je nomme les « OGM bio », ce sont les OGM que la nature aurait été capable de produire sans l’intervention de l’homme ! Sortons du débat des OGM par le haut !
2/ Pourriez vous donner 3 exemples concrets de dispositif que vous aimeriez mettre en œuvre au lendemain de votre élection, sur la base, par exemple, des 3 thématiques présentées lors de la conférence de l’après midi ?
- Mesure concrète « 1 » : Faire dans les Lycées ce que fait Bordeaux dans ses restaurants scolaire 100% local, 29% bio !
La Région est un consommateur ! Comme consommateur, comme client de l’agriculture, dans ses Lycées, par exemple, notre nouvelle Région peut faire des progrès ! L’objectif de Virginie Calmels est de faire au niveau de la Région ce que la ville de Bordeaux fait à Bordeaux, en partenariat avec la ville de Mérignac. 3 millions de repas servis, 29% de Bio dans les assiettes mais surtout 100% de produits du grand sud-ouest de la France !
Si je prends l’exemple que le viande crue c’est 11% de viande traditionnelle, 31% de label rouge, 58% de bio, 80% de provenance grand Sud-Ouest.
Tout cela n’est pas simple à mettre en place car le code des marchés publics ne permet pas tout ! Il y a bien sur la possibilité de mettre dans les appels d’offres des critères environnementaux et sociaux (soit dit en passant la Région Aquitaine ne les a mis en place qu’en 2015 !) mais ce n’est pas suffisant, il faut aller plus loin.
Virginie Calmels, Présidente de la Nouvelle Région sera le porte-parole de ces difficultés et œuvrera pour plus de liberté dans les achats des collectivités locales !
Gandhi disait « Soyez le changement que vous souhaitez » et bien la Région si elle souhaite défendre son agriculture, doit donner l’exemple et faire travailler les paysans de la Grande Région !
- Mesure concrète « 2 » : Formation des acheteurs publics (formation professionnelle, apprentissage) ;
Aide à la formation des intendants et des cuisiniers (marchés publics, connaître l’offre locale, organisation optimisée pour moins de gaspillage) ;
Guide de l’acheteur public : seuils d’achat sans appel à concurrence (<15 000€ et si <90 000 marchés à procédure adaptée), marchés spécifiques, allotissements, critères % bio, décret 2011 : performance en matière de développement des approvisionnements directs.
- Mesure concrète « 3 » : structurer la filière et organiser l’aval !
Le programmes de développement rural (FEADER) prévoient des aides pour conversion au bio des exploitations et leur maintien. Les aides de la Région doivent aller à l’organisation de la filière et en particulier la transformation, la commercialisation, la distribution.
Négociations avec les grandes entreprises de restauration collective (délégataires de service public pour la fourniture de repas aux hôpitaux, maisons de retraite…) ou approvisionnant les entreprises pour augmenter le % de produits locaux et bio, et le des circuits courts dans les approvisionnements.
Soutien à la mise en place de plateformes d’approvisionnement collectif et soutien aux projets alimentaires territoriaux (loi agriculture 2014). Ce qui permet d’augmenter la part de marché de produits français /importations à bas coût et de préserver l’emploi agricole dans la grande région (pertes continues de surfaces agricoles et dépeuplement avec tous les enjeux sociaux induits).
Bonjour Yves,
Une idée en passant : aller sur youtube regarder les vidéo de Christophe Piou et Frédéric Thomas. Cette (ces) vidéo (s) met en évidence que l’on a tout sous la main et que les seuls à risquer de s’en pleindre sont Messieurs « Monsento » et « RhonePoulinc ».
De plus et sans rien connaitre de la viticulture il me semble même que leur méthode pourrait s’introduire dans la conduite de la vigne.
Autre idée en passant, pourquoi ne pas associer dans une réflexion agricole globale de votre région les « éleveurs d’huitre » du bassin d’Arcachon
Ce ne sont peut être pas de bonnes idées, mais ce sont des idées.
Cordialement
Eric
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