Les collectivités qui ont choisi de passer aux nouveaux rythmes scolaires en 2013 et qui comptait sur les financements de l’Etat et de leur caisse d’allocations familiales (CAF) pourraient bien en être pour leurs frais. Le 3 juin, dans la cour de Matignon, Jean-Louis Deroussen, président de la CNAF ne cachait pas son agacement face aux tergiversations de l’Etat sur la question du financement de cette réforme.
Dans le dossier de presse concernant la rénovation de la politique familiale, dont le gouvernement a réservé la primeur hier au Haut conseil de la famille, figure en effet un paragraphe très ambigu qui n’a fait l’objet d’aucun commentaire de la part du gouvernement : l’affectation de 250 millions d’euros en année pleine, à la réforme des rythmes scolaires.
Ambiguïté
De quoi parle-t-on exactement ? Du fonds d’amorçage de l’Etat ? De l’enveloppe que la Cnaf devrait verser aux communes qui ont fait le choix de passer aux nouveaux rythmes scolaires en 2013 au titre des prestations de services ?
Le gouvernement semble avoir joué jusqu’au bout sur cette ambiguïté pour finalement annoncer la couleur en fin de semaine dernière. « J’ai appris qu’il n’y aurait pas de fonds d’amorçage de l’Etat. Le gouvernement demande aujourd’hui à la Cnaf de le suppléer et de verser le fonds d’amorçage aux communes selon les modalités prévues initialement », s’insurge Jean-Louis Deroussen.
Yves Fournel, élu en charge de l’éducation et de la petite enfance de la ville de Lyon, et président du Réseau français des villes éducatrices (RFVE), lui aussi présent à Matignon, confirme le flou artistique que le Premier ministre laisse planer sur le financement de la réforme des rythmes scolaires : « Il devait y avoir deux types de financement : le fonds d’amorçage de l’Etat, versé aux communes par le biais des préfectures, et l’enveloppe prise sur le Fonds national d’action social (Fnas) de la Cnaf pour financer les prestations de services, d’un montant équivalent. J’ai posé la question au Premier ministre. Il m’a répondu qu’il n’évoquait aujourd’hui que la “politique familiale”. A ce jour, nous naviguons dans le flou, sans savoir si le financement des activités périscolaires via les prestations de services de la Cnaf débuteront en 2013 ou 2014 », admet l’élu.
Contraints et forcés.
Dans le cadre des négociations de la convention d’objectif et de gestion (COG) qui lie l’Etat et la Cnaf pour cinq ans, et qui devraient aboutir prochainement, le gouvernement insiste pour que la Cnaf finance les activités périscolaires issues de la réforme des rythmes scolaires, même si elles sont gratuites pour les parents, et même si les taux d’encadrement ne sont pas conformes à ceux exigés habituellement par les CAF.
« Ces points sont encore en discussion », confirme Jean-Louis Deroussen, qui entend de toute façon rester ferme face à un gouvernement qui les a mis devant le fait accompli. « Si nous payons pour le fonds d’amorçage, ce sera contraints et forcés ! Mais en aucun cas, nous ne paierons deux fois. Le financement de l’activité périscolaire aura lieu uniquement là où nous financions déjà les collectivités au titre des activités de loisirs sans hébergement (ALSH). Nous ne voulons pas que la Cnaf soit remise en cause pour ce désengagement de l’Etat », prévient-il.
Un désengagement d’autant plus incompréhensible que les montants en jeu pour le fonds d’amorçage ne sont pas importants, peu de communes ayant fait le choix de passer aux nouveaux rythmes en 2013. D’après les estimations de la Cnaf, il s’agirait de débloquer 27 millions d’euros en 2013 et 80 millions d’euros en 2014. « Quand les élus vont découvrir qu’il ne peuvent pas compter sur l’aide attendue, ils risquent de renoncer à leur décision de passer aux nouveaux rythmes dès 2013 », prévoit le président de la Cnaf. A un mois des vacances d’été, il serait en effet temps pour le gouvernement d’annoncer clairement les règles du jeu.