Virginie Calmels : « GPSO : l’arbre ne doit pas cacher la forêt »

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Présentation hier à Libourne devant un parterre d’élus locaux et d’usager des TER de notre projet global des transports en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes.

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Tribune de VIRGINIE CALMELS, tête de liste d’union de la droite et du centre en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes.

La récente décision du Gouvernement de poursuivre la procédure de déclaration d’utilité publique pour le projet de lignes à grande vitesse Bordeaux-Dax et Bordeaux-Toulouse (GPSO) est un non événement. Annoncée par un tweet, une confidence d’ami à ami entre Alain Vidalies et Alain Rousset, puis à l’occasion d’un meeting politique du PS, elle a suscité un émoi sans rapport aucun avec sa réelle portée. Elle n’engage en effet aucun changement significatif quant à l’avenir du projet et constitue surtout un cadeau électoral et médiatique fait par un gouvernement aux abois, à un président sortant qui commence à se rendre compte que la grande région lui échappe.

Passons sur la légèreté avec laquelle le gouvernement a souhaité passer outre, sans autre forme de procès, l’avis négatif de la Commission d’enquête publique. Il n’est donc apporté aucune réponse satisfaisante aux plus de 15 000 contributions qui témoignaient des nombreuses interrogations et aux réserves des citoyens. Au premier chef, les viticulteurs ne se voient offrir aucun gage de rassurance.

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Que les anti-GPSO se rassurent toutefois : il faut bien rappeler qu’une déclaration d’utilité publique ne représente en aucun cas le lancement du projet, mais simplement la préservation d’une possibilité dans l’avenir. La déclaration d’utilité publique correspond ainsi au mieux à un « Oui, pourquoi pas », émis du bout des lèvres. Les projet de LGV Bordeaux-Dax et Bordeaux-Toulouse ne sont donc pas prêts de voir le jour, et ce avant tout pour de très évidentes raisons de financement.

Quelque soit en effet l’intérêt intrinsèque du projet de GPSO, on ne peut que s’étonner que l’État décide de relancer un projet de 9,1 milliards d’euros, sans présenter toutefois la moindre piste de financement.

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La question est simple : qui paiera ?

  • L’Agence de financement des infrastructures, déjà très en retard dans ses paiements pour la LGV Bordeaux-Tours, et que la suppression de l’écotaxe en 2013 avait privé de près d’un milliard d’euros de ressources par an, vient de voir son budget amputé de 400 M€ pour 2016.
  • La SNCF, comme son président l’a encore récemment confirmé à Sud-Ouest, n’a pas les moyens de financer le GPSO et place sa priorité dans la modernisation du réseau existant. Elle tente même de se désengager – un peu honteusement – des autres projets de LGV dont elle s’était pourtant faite une fervente avocate.
  • Les collectivités locales se sont déjà saignées pour financer la ligne Bordeaux-Tours, et subiront d’ici 2017 une diminution de 11 milliards d’euros des dotations de l’État.
  • L’Europe, lointaine et commode figure de sauveur, régulièrement convoquée par le président sortant quand il se trouve à bout d’arguments, n’a financé que 0,21 % de la LGV Bordeaux-Tours, et ne s’intéresse qu’aux sections transfrontalière : elle n’apportera donc pas un centime pour la ligne Bordeaux-Toulouse. Le plan Juncker, autre mirage, ne prévoit pas de subventions, mais seulement des garanties d’emprunt.
  • Le grand emprunt « LGV », avancé parfois par le président sortant, reviendrait à alourdir encore la dette, qui plus est à des conditions très défavorables puisque les investisseurs institutionnels et les banques sont désormais très échaudés par les alarmes répétées de la ligne Bordeaux-Tours, qui frôle la banqueroute à chaque nouveau frisson de la SNCF.
  • Les usagers, l’habituelle vache à lait des coûteuses ambitions de la Gauche, paient déjà très cher pour un service de plus en plus dégradé. La Commission d’enquête publique soulignait d’ailleurs dans son rapport que la fréquentation prévue de la ligne serait trop insuffisante pour lui assurer une véritable rentabilité, à moins d’une explosion du prix des billets.

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De qui se moque-t-on alors ?

L’annonce du Gouvernement n’est qu’une opération de communication, une de plus, dans le seul but de faire plaisir à un ami, et dont personne n’est plus dupe. Cette décision de poursuivre la déclaration d’utilité publique ne règle rien : tous les problèmes sont encore devant nous.

Il nous revient donc la responsabilité de construire un projet global pour les infrastructures de transport de la grande région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes. Un projet ambitieux, c’est-à-dire efficace, réalisable et pragmatique, qui traite les problèmes dans l’ordre.

À court terme, l’urgence est de moderniser les infrastructures de proximité, ce qui passe par un plan d’aménagement des routes. Depuis de trop nombreuses années, les exécutifs régionaux, par entêtement idéologique, ont refusé d’investir dans la modernisation du réseau routier. Les routes pourtant doivent constituer la priorité absolue : elle sont la condition impérative du désenclavement des territoires. La grande région devra notamment :

  • Lancer les études relatives à la mise en 2×2 voies de la RN 21 entre Limoges et Agen ;
  • Financer une 2×2 voies sur le tracé de l’A 831 entre Rochefort et Fontenay-le-Comte et inscrire cet itinéraire indispensable au désenclavement de la Charente Maritime au CPER 2015-2020 ;
  • Réaliser le projet de mise en 2×2 voies de la RN 147 entre Limoges et Poitiers, un axe structurant abandonné sans raison par le président sortant du Poitou-Charentes ;
  • Finir la rocade de Marmande ;
  • Réaliser les aménagements de la RN 134 entre Oloron et Pau.

À moyen terme, il devient vital d’établir un plan de renouvellement des TER en exigeant de l’État une revalorisation de sa dotation de renouvellement du matériel, qui stagne au même niveau depuis 2002 alors que dans le même temps, faute d’anticipation, les dépenses de rénovation du matériel engagées par le Conseil régional d’Aquitaine ont augmenté de 270 %. Ainsi, à l’horizon 2020, toutes les rames devront avoir été renouvelées.

Ce plan de renouvellement devra poursuivre un objectif d’efficacité et répondre à l’urgence. Tous les usagers savent combien la ligne Bordeaux-Libourne est saturée, combien la ligne Limoges-Ussel est décatie. Tous déplorent la mauvaise qualité des lignes Poitiers-Lusignan et Poitiers-Montmorillon. Là ne semble pourtant pas être la priorité du président sortant, qui après avoir dépensé 130 M€ pour les 25 km de la ligne Oloron-Bedous, empruntée seulement par quelques rares touristes, s’engage dans le pharaonique projet de la ligne Bedous-Canfranc, qui coûtera plus de 370 M€ aux contribuables de la région.

Il faut également lutter avec la plus grande vigueur contre les retards des TER, en renforçant significativement les sanctions financières contre la SNCF.

À long terme enfin, avant de se lancer dans l’aventure d’un GPSO pas encore financé, il est de bon sens d’assurer la pérennité du projet de ligne Bordeaux-Tours. La SNCF, sur la base d’estimations qu’elle refuse de rendre publiques, quitte à susciter le doute, a décidé unilatéralement de réduire la desserte de la ligne : des 19 allers-retours quotidiens prévus par l’accord avec les collectivités locales et le concessionnaire de la ligne, elle est désormais descendue à 13 allers-retours, tout à fait insuffisants pour garantir la rentabilité de la ligne. La desserte de Bordeaux serait ainsi inférieure à celle de Rennes, dont la population est pourtant moindre de 40 %.

La future Grande région devra donc peser dans la négociation pour revenir aux termes d l’accord. Elle devra aussi dans cette perspective honorer les paiements de la région Poitou-Charentes, qui en refusant de s’acquitter de sa part du financement de la LGV, compromet l’ensemble de l’édifice.

Dans la perspective enfin du GPSO, il sera également nécessaire de réaliser d’importantes études complémentaires pour améliorer le tracé de ses lignes et s’assurer qu’elles ne nuisent ni à l’environnement, ni aux riverains.

La grande vitesse va dans le sens de l’histoire et de la modernité. Le développement du Sud-Ouest et son intégration avancée dans l’ensemble du réseau national et européen dépendent de la création de ces axes structurants d’aménagement du territoire. Mais pas à n’importe quel prix ! Quelle en sera réellement la modernité dans vingt ou trente ans ? Quoi qu’il en soit, la grande vitesse seule ne suffit pas : il faut penser toutes les infrastructures de transport. Offrir davantage de choix de mobilité, c’est d’abord donner aux habitants plus de liberté. C’est un vecteur, même si ce n’est pas le seul, de développement des territoires et de l’emploi. C’est ainsi que nous préparerons l’avenir.

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