« L’année 1888 a commencé tristement pour l’Association des Saint-Louis des Maronites. Notre éminent confrère, notre pieux et si dévoué secrétaire général, le vicomte de Ponton d’Amécourt nous a été enlevé le 20 janvier sans que rien pût faire redouter ce fatal évènement. Nous savions tous que notre ami était souffrant depuis plusieurs mois, il venait rarement à Paris et prétextait un besoin de repos absolu pour quitter le moins possible a propriété de TRILPORT, mais quand nous le revoyions parfois à nos réunions de la rue de Fürstenberg, nous étions presque tentés de douter de ses souffrances, tant il s’efforçait de se montrer tel que nous l’avions toujours connu, causeur charmant, gai, spirituel, gracieux pour tous et plein de zèle pour notre œuvre.
Fidèle aux traditions de Poujoulat et de son cousin le vénérable Louis de Baudicour, le vicomte d’Amécourt n’oublia jamais de commencer nos séances du secrétariat général par une prière à Dieu et de les clore par une invocation à la Vierge. Il savait que nous faisions le bien, que nous étions utiles à l’Eglise catholique d’abord et à la France ensuite. Il ne mettait donc pas en doute que Dieu ne vint en aide à nos travaux et sans se préoccuper de la difficulté des temps, de la modicité de nos ressources, il nous soutenait par sa foi et par son patrimoine.
Il ne nous appartient pas dans ce bulletin de parler de l’homme politique et du savant. Sa réputation comme numismate était européenne et sa collection de médailles mérovingiennes passe pour être sans rivale. Cependant telle était sa modestie qu’il évitait en général d’amener la conversation sur ses études favorites. Oh il lui été facile de faire preuve d’une science incontestable. On l’a dit en effet c’était un vrai chrétien et c’est le chrétien que nous regrettons surtout, c’est le chrétien dont la mort sera considérée comme un deuil dans toutes les provinces du LIBAN où on aime l’Association de Saint-Louis et où le prêtre avait appris à connaître le nom de son secrétaire général.
Les évêques maronites réunis à Rome au Couvent de leur nation, place de Saint-Pierre-aux-Liens ont été les premiers à connaître la mort de notre regretté secrétaire général.
« Je ne saurais vous exprimer mon cher comte, m’écrit à ce sujet l’éminent archevêque de Chypre, quelle a été notre douleur à tous en apprenant par votre lettre la mort prématurée du si parfait vicomte de Ponton d’Amécourt, président de votre chère association de Saint-Louis. J’ai communiqué la triste nouvelle à mes vénérables collèguesde l’épiscopat, aux prêtres de notre nation qui nous ont accompagnés à Rome et aux pieux religieux maronites qui nous offrent l’hospitalité dans leur collège. Tous nous avons résolu d’abord de prier pour l’âme de notre bienfaiteur et sans retard nous nous sommes rendus à la chapelle pour y chanter l’office des morts. Le lendemain toutes nos messes ont été célébrées à son intention. Puisse son âme si chrétienne, si généreuse être admise déjà dans le sein d’Abraham. »
Ces nobles sentiments si simplement exprimés, ces regrets sincères de vénérables prélats mandataires d’une nation tout entière, cette façon si touchante d’exprimer une reconnaissance méritée, ne sont-ils pas la plus véritable des consolations que nous puissions transmettre à la famille de l’ami que nous avons perdu et dont le souvenir reste si intimement lié à celui de Louis de Baudicour. »
Comte d’Aviau de Piolant
Les membres du secrétariat général ont fait célébrer une messe à Saint-Thomas d’Aquin pour le repos de l’âme de M le vicomte de Ponton d’Amécourt. Tous nos associés qui ne pouvaient se joindre à la nombreuse assistance des parents et des amis du regretté défunt qui s’étaient donné rendez-vous à Saint-Thomas, voudront bien à leur tour ne pas l’oublier dans leurs prières.
Quelques jours après la cérémonie, les membres du Secrétariat réunis rue de Furstenberg désignaient à l’unanimité , pour succéder à M d’Amécourt, le marquis de Lévis dont le zèle pour toutes les oeuvres catholiques est si connu à Paris. M le Marquis de Lévis a visité la Syrie et une partie du Liban. Les Maronistes peuvent donc être certains de trouver en lui le digne continuateur des amis dévoués de leur nation; qui avaient nom Poujoulat, Louis de Baudicour, Ponton d’Amécourt.
(Merci à Monseigneur Nasser GEMAYEL, évêque des chrétiens Maronites de France, rencontré à plusieurs reprises depuis 2015, depuis que notre commune et celle de Hadchit ont fondé un jumelage. Il m’a transmis une copie de ce bulletin de Saint-Louis des Maronites d’avril 1888. J’y ai découvert, grâce à lui, un lien important qui unissait ma famille au Liban. Je n’en avais jamais entendu parler auparavant. Il y a des concours de circonstance qui permettent d’ouvrir un livre quand on pensait simplement écrire une nouvelle page…)