Entre 1793 et 1796, la Vendée fut le théâtre d’affrontements d’une rare violence entre des paysans insurgés et le pouvoir révolutionnaire dirigé par Robespierre. 170 000 Vendéens furent massacrés par les armées de la République, au point que certains historiens n’hésitent pas à employer aujourd’hui le terme de génocide !
La population Vendéenne a-t-elle fait l’objet d’une élimination méthodique et programmée ? Que s’est-il réellement passé durant ces trois années de combat ? C’était le sujet de l’émission « L’ombre du doute », mercredi soir.
En ce début de 21ème siècle, le service public nous a livré un travail d’historien remarquable, qui permettra à la république, avec d’autres travaux -comme ceux qui ont lieu au Mans actuellement-, au bout d’un long chemin, d’affronter toute la lumière et de reconnaître sa part d’ombre, de reconnaître le rôle qu’elle a jouer dans le « génocide » Vendéen, ou plus justement le « populicide » du peuple de Vendée, tel que le décrit déjà en 1794, Gracchus Babeuf, pendant la Convention thermidorienne.
Tout a commencé au début de l’année 1793. La République fête son premier anniversaire dans un climat de grande instabilité. A l’extérieur, les monarchies européennes menacent les frontières. A l’intérieur, les troubles se multiplient. Des paysans déçus par la Révolution se soulèvent, tout particulièrement en Vendée Militaire, une région qui regroupe tout le Centre Ouest de la France. A Paris, le pouvoir se sent menacé. A la suite de sa ligne dure représentée par Robespierre, le Comité de Salut Public décide de réprimer le mouvement sans ménagement. L’insurrection s’est organisée en une Armée catholique et royale : l’armée « blanche », ainsi appelée en référence à la couleur emblématique des royalistes. Elle mène la vie dure à l’armée « bleue », qui doit son nom à la tunique des soldats républicains. Mais à la fin de l’année 1793, la révolte est férocement matée.
La République a tremblé, elle veut maintenant se venger. Sous les ordres du Comité de Salut Public, les massacres continuent. Des dizaines de milliers de prisonniers sont torturés, violés, fusillés ou noyés… L’armée traque sans relâche les Vendéens pour les éliminer méthodiquement. En 1794, Robespierre est exécuté et la situation commence à se tasser. Il faudra attendre 1796 pour que la guerre cesse, laissant derrière elle une Vendée exsangue.
Un documentaire de 52’, réalisé par Richard Vargas, raconté par Franck Ferrand.
Bibliographie :
Robespierre de Jean Artarit, CNRS editions
Charette d’Anne Bernet, Editions Perrin
La Guerre de La Vendée et le système de dépopulation de Gracchus Baboeuf, Editions du Cerf
Ouvrages présentés en plateau :
La Vendée – Vengé : le génocide franco-français, de Reynald Secher, Perrin, réédité en 2006
Blancs et Bleus dans la Vendée déchirée de Jean-Clément Martin Collection découvertes Gallimard, 2008
Quatre-vingt-treize de Victor Hugo
Vendée : du génocide au mémoricide : Mécanique d’un crime légal contre l’humanité, de Reynald Secher, Préface d’Hélène Piralian, Stéphane Courtois et Gilles-William Goldnadel, éditions du Cerf, 2011
La Vendée et la Révolution. Accepter la mémoire pour écrire l’histoire de Jean-Clément Martin, Perrin, collection Tempus, 2007
Une blessure française : les soulèvements populaires dans l’Ouest sous la Révolution de Pierre Péan, éditions Fayard, Paris, 2008
Guerre de la Vendée et des Chouans de Joseph Lequinio, commenté par Jean Artarit, édité par le Centre Vendéen de Recherches Historiques
Robespierre de Joël Schmidt, Folio Classique.
Intervenants :
Elodie Cabot, anthropologue, Stéphane Courtois, historien, Jean-Clément Martin, historien, Reynald Secher, historien, Michel Chamard, historien, Jean Artarit, psychiatre et historien
Dominique Lambert, président de l’association Vendée Militaire, Bruno Galland, conservateur aux Archives Nationales, Michelle Chatrain, conservatrice au Musée de Granville, Noël Stassinet, historien, Antoine Boulant, historien.
Lieux :
Archives Nationales, Service historique de la Défense, Musée de Granville, Forêt de Maulévrillier, la Chapelle-Basse-mer, Chateau de La Durbellière, Nantes, Le Pins en Mauge, Les Lucs sur Boulogne, Machecoul, Granville, Cholet, la Chabotterie, Les Herbiers, Rennes, Le Mans, Paris.
Retrouvez les documents issus des archives nationales à partir des cotes suivantes :
Accord du Comité de Salut Public au Général Turreau : C.A.R.A.N AFII/280/2337/33, Lettres et correspondances du Comité de Salut Public évoquant l’extermination des Vendéens : C.A.R.A.N AFII/268/2257/36 ; C.A.R.A.N AFII/268/2257/85 ; C.A.R.A.N AFII/268/2258/4 ; C.A.R.A.N AFII/268/2260/89 ; C.A.R.A.N AFII/268/2261/17 ; C.A.R.A.N AFII/268/2261/81 ; C.A.R.A.N AFII/277/2322/61 ; C.A.R.A.N AFII/277/2323/25 ; C.A.R.A.N AFII/278/2330/58
Bonjour,
c’est bien de rappeler le terme de « populicide », forgé par Gracchus Baboeuf, membre éminent de l’extrême gauche de la révolution, qui dénonçait en son temps ces massacres inutiles perpétrés par la convention. Bon nombre d’historiens conservateurs voient actuellement dans la Vendée l’invention du meutre de masse moderne, planifié administrativement: donc la Convention préparerait les tragédies du XX ème siècle. Je conteste bien sûr vigoureusement ces analyses qui oublient les massacres planifiés de la monarchies sous Louis XIII et la destruction souvent systèmatique des protestants et de leurs places fortes. Tonneins, par exemple, pas très loin de votre canton, fut entièrement détruite et sa population protestante quasiment massacrée en 1621. Je ne parle pas du siège de la Rochelle par Richelieu. Plus tard, sous Louis XIV, la terrible répression royale contre les Camisards, a été très voisine de ce que sera celle de Vendée. Entre temps, en 1639, la révolte des Croquants du Périgord s’était soldée par le massacre de 3000 insurgés réfugiés à la Sauvetat-du-Drop par le fils du duc d’Epernon. Tout ça pour dire qu’il y a une continuité dans l’exercice brutal du pouvoir par la monarchie ou la République. Le pouvoir central réagit violemment lorsqu’il se sent menacé par des forces qui pourraient le remettre en cause. Malgrè son adhésion aux principes des droits de l’Homme et du citoyen dans le cas de la République…Raison d’Etat ou respect de la dignité humaine? Vaste débat philosophique…
Le Prix littéraire des droits de l’Homme 2012 sera remis à Reynald Secher officiellement le 17 octobre 2012.
Ce prix a été emis en 2009 par Jean-Louis Debré, Président du Conseil Constitutionnel, en 2010 par Frédéric Mitterrand, Ministre de la Culture, en 2011, par Jean-Pierre Bel, Président du Sénat.