Les derniers évènements de N’Djamena devraient nous faire réfléchir sur nos rapports avec l’Afrique. Qu’aurions nous fait ou dit si un pays tiers était arrivé dans nos quartiers sensibles pendant les émeutes, pour extraire une centaine d’enfant et les emmener ailleurs, dans un autre pays, pour les confier à des familles prêtes à les adoptées, ceci au motif que les jeunes des banlieues étaient alors « en danger » en France ?

Mais qui sommes nous pour mettre en place de telles opérations chez les autres ?

Les français partis là bas, l’ont fait de bonne foi… Ils ont juste oublié qu’ils n’auraient jamais osé faire ça en France ! Pourquoi l’ont-ils osé en Afrique ? Quand considérerons nous le peuple africain ? Un économiste béninois confiait récemment que la France « a besoin de penser que l’Afrique ne va pas bien ». J’en suis intimement persuadé.

En raisonnant avec notre propre référentiel culturel, nous sommes aveuglés et ne voyons pas que le Maghreb et l’Afrique abordent un véritable boom économique. Les Chinois et les Indiens ne s’y trompent pas qui y investissent à tout de bras.

Lorsque la communauté internationale aura donné une valeur au carbone, l’Afrique équatoriale aura entre les mains un nouveau gisement économique de grande ampleur. Dans ce contexte, au lieu d’arracher des enfants à leurs racines, la France et la communauté internationale ont mieux à faire.

Par exemple, nous ferions mieux de nous battre pour que les chefs d’état délinquants après avoir détourner l’argent du pétrole, celui des diamants, celui de l’uranium, celui de la déforestation de la forêt équatoriale, ne s’organisent pas, aussi, pour toucher les royalties de la taxe carbone ! Pour ce faire la Tribunal Pénal International doit disposer d’outil nouveaux pour lutter contre « abus de biens nationaux » et les « guerres de gisements », qui visent à sacrifier des populations sur l’hôtel des richesses minières et fossiles, et bientôt carbone !

Comprendre l’Afrique, c’est connaître ses cultures et admettre enfin que la coopération est réciproque (sic). Dans co-développement, si l’on parle souvent de notre participation au développement de l’Afrique, on oublie trop souvent d’évoquer l’apport de l’Afrique à notre propre développement :

  • en nous permettant de commercialiser dans le monde entier des produits de l’agriculture africaine (banane, cacao, épices …);
  • en nous permettant d’exploiter et de commercialiser les richesses minières d’Afrique;
  • en nous transférant des usages et des cultures qui nous ont permis d’intégrer de nouvelles dimensions à notre culture : musique, instruments, danses, … Le gouvernement vient d’ailleurs de décider à l’initiative de « Génération Afrique » de relancer la coopération artistique en donnant la possibilité à de jeunes talents africains d’être parrainés par des artistes du nord comme du sud, à l’image de ce qui c’est fait dans les années 70;
  • en prêtant main forte à la construction de la France (travaux publics, bâtiment, ..);
  • en permettant à nos multinationales du tourisme de vendre des produits en Afrique (Maghreb, Sénégal, …)

Dans un excellent livre intitulé « Savoir du Sud », édité par la Fondation pour le Progrès de l’Homme (FPH), on énumère les usages du Sud qui ont été adoptés par les pays du Nord… sur de très nombreux sujets. C’est édifiant et instructif. Cela doit nous rendre plus modeste et plus reconnaissant vis-à-vis de l’Afrique:

  • Non, nous sommes pas le nombril du monde !
  • La terre n’est pas plate , elle est ronde !
  • Sur la carte du monde imprimée sur nos livre et affichée sur nos murs, dans les écoles, l’europe n’est au centre, que par dessin (ou par dessein ?)
  • Vu de France, chacun de nous se sent « entre l’est et l’ouest », « entre le nord et le sud »… avec une mission toute particulière de médiation « est-ouest » et « nord-sud ». Mais en fait, tous les citoyens du Monde sont entre l’est et l’ouest et entre le nord et le sud, avec une mission toute particulière de médiation « est-ouest » et « nord-sud » !

Et puis, l’Afrique, ne l’oublions pas, est le berceau de l’humanité ! N’oublions pas de l’enseigner à nos enfants.

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2 commentaires sur “Comprendre l’Afrique…”

  1. Pierre De Gaétan Njikam

    comment ne pas réagir à lignes venant d’un fin connaisseur des réalités -toujours dynamiques- du continent africain? Pour dire d’abord ma convergence avec l’analyse d’Yves d’Amecourt. Oui l’histoire récente de l’Afrique, pour ne pas dire des Afriques, s’accélère et une génération – nouvelle – ou simplement de plus audible et visible grâce à la globalisation des échanges et les NTIC- s’étonne souvent sous les tropiques de l’ignorance ou de la méconnaissance de telles dynamiques africaines…
    Il y a quelques jours lors d’une rencontre à New-York avec le Pr Mamadou Diouf (d’origine sénégalaise), titulaire de la Chaire d’Histoire et d’Etudes africaines de la célébre Colombia University, nous évoquions la nécessité d’oeuvrer ou de continuer à oeuvrer afin que les voix de cette "Autre Afrique" – dont parle si justement Yves d’Amecourt- soit plus entendue, mais surtout reçue…
    A cet égard, notre responsabilité collective est engagée, parce que mieux "comprendre l’Afrique" c’est aussi mieux comprendre notre France…
    Je pense néanmoins que nous en avons pris le chemin, en dépit de quelques dérapages, et que la circularité d’une relation forte avec l’Afrique et l’Europe doit être confortée; oui mon cher Yves, la terre est bien ronde! Et merci pour cette éclairant rappel du coeur et de la raison pour cette Afrique qui nous est si chère!
    Pierre De Gaétan

  2. Un peu surpris tout de même de la comparaison. Pour faire un peu "raciste" on pourrait dire au mieux que je n’imagine aucun pays d’Afrique tenter de "sauver" quelques uns de nos "compatriotes", en grand danger, a fortiori, s’agissant de "compatriotes" particulièrement surexcités ….en quoi les enfants de l’Arche de Zoé leurs sont-t-ils comparables ??? …en âge, en mode de vie, en péril imminent ?
    Et pour faire toujours dans l’excès, mais par méthode des contraires, si tel avait pu être le cas, pure hypothèse d’école, je me demande si certains – sans dire beaucoup – n’auraient pas cotisé pour aider à un tel "rapatriement sanitaire".

    Yves j’ai confiance en ta générosité et je ne doute pas que tes propos ne la traduisent pas ; je voulais simplement te dire que, même si je ne connais pas grand-chose à la politique du grand continent africain, je suis extrêmement sceptique sur le bon fondement …et les réels objectifs de ces relents de francophobie que l’on nous crache à la figure, y compris par ceux qui, installés en France, osent nous faire des reproches. Qu’ont-ils fait pour leurs malheureux compatriotes, eux ?

    Non il y a des attitudes qui me paraissent intolérables, allons nous nous laisser longtemps traiter de négriers, de colonialistes, nous dicter la loi, ce que nous devons faire, au nom de ce que ceux qui nous insultent attendent de nous.

    Personnellement je n’accepte pas ces avalanches de haine à notre égard ; il nous faudrait faire notre, en France, la charia, le fétichisme, le clanisme, l’excision, la traite des enfants engagés sous les armes lorsque les nôtres s’amusent dans les cours de récréation, sur les plages ou à la neige. Arrêtons de nous battre la coulpe, de nous repentir y compris de ce que nous n’avons pas commis.

    Et si quelques uns ont été coupables, ce qui reste à démontrer, il y a des hauts responsables, dont les systèmes judiciaires – celui d’un pays démocratique –et celui d’un pays qui ne peut prétendre l’être- pour en décider.

    De grâce, ne laissons pas nos bons sentiments prendre le dessus sur un minimum de réalisme.

    Bien amicalement à toi Yves

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