Le vendredi 24 octobre restera pour moi une date importante. Ce soir là, le Père Christian, mon parrain, un homme dont la vie a participé- et participe encore – à forger la mienne, recevait la Légion d’Honneur à la Case De Gaulle, à Brazzaville, des mains de l’Ambassadeur de France au Congo-Brazzaville.
24 octobre 2008 – Ambassade de France au Congo Brazzaville (Case De Gaulle) – Remise des insignes de chevalier de la Légion d’Honneur au Père Christian de la Bretesche, missionnaire.
- Discours de Monsieur Normand, ambassadeur de France au Congo Brazzaville.
« C’est une grande joie pour moi de remettre aujourd’hui la Légion d’Honneur au Père Christian de La Bretesche. Missionnaire spiritain, il est Congo un modèle d’humanité et de générosité, déployant une activité à tous égards digne d’admiration, dans des domaines extrêmement variés, de la musique à la création d’entreprises, en passant par le journalisme. Aussi, Père Christian, c’est avec une émotion sincère et un profond respect que je m’adresse à vous en cette occasion.
Dès votre premier séjour au Congo, de 1963 à 1968, vous vous êtes tourné vers les jeunes ; dans un pays qui venait d’obtenir son indépendance, vous avez été alors à l’écoute des grands espoirs. Ces espoirs sont toujours bien vivants, quarante-cinq années plus tard ; vous savez les accueillir, les nourrir, aider à leur concrétisation, quelles que soient les difficultés – et elles sont nombreuses.
Vous passez ensuite treize années auprès des artistes africains expatriés en Europe ; vous avez joué un rôle important dans l’essor de la musique africaine en France au cours des années 1970, en participant aux premières émissions de télévision française (NDLR : avec le groupe les echos noirs puis M Bamina) sur ce thème aux cotés de personnalités connues dans le monde entier, comme Manu Dibango.
Vous revenez au Congo en 1981, et y avez passé la plus grande partie de votre temps, toujours à l’œuvre en dépit des bouleversements et des crises, sachant regarder les évènements avec recul, tout en montrant une profonde empathie avec les hommes et les femmes qui vous entourent ; hier comme aujourd’hui, vos tribunes dans LA SEMAINE AFRICAINE en témoignent.
En, 1989, vous créez le FORUM DES JEUNES ENTREPRISES DU CONGO, qui soutient les jeunes créateurs d’entreprises, en particulier dans le secteur agro-alimentaire, et leur offre un lieu où partager leurs expériences. Ils peuvent ainsi donner à leur initiatives de meilleurs chances de succès, dans un environnement économique, juridique et politique souvent délicat. Ce FORUM DES JEUNES ENTREPRISES a été à l’origine d’autres structures, en particulier, les CENTRE RURAUX COMMUNAUTAIRES DE RESSOURCE PROFESSIONNELLE qui existent aujourd’hui dans le Pool, et le Kouilou. Il s’agit notamment de favoriser l’insertion des jeunes dans le monde du travail, un enjeu majeur pour un pays dont plus de la moitié de la population a moins de vingt ans. Enfin, en 2002, vous avez commencé d’animer le projet POINTE NOIRE INDUTRIELLE, visant à aider à la création et à la gestion de petites entreprises dans la capitale économique du Congo.
Vos engagements dans le domaine socio-économique ne vous ont pas fait oublier votre passion pour la musique et le journalisme, et vous continuez à appuyer les jeunes qui s’y impliquent. L’éclectisme de votre action au Congo, et à Pointe Noire en particulier, montre à quel point vous êtes soucieux d’un développement harmonieux de la personne humaine, d’un développement qui prenne en compte tous les besoins et toutes les facultés de l’individu, y compris, certainement, la spiritualité. A l’heure des fluctuations boursières dans le monde, vous, vous incarnez la constance des valeurs humaines.
Père Christian, la passion avec laquelle vous vous êtes mis au service des autres, et des jeunes de ce pays en particulier, l’estime que votre action suscite chez tous font de vous l’une des grandes figures de la présence française au Congo. Ce bref discours ne peut suffire à rendre compte du dévouement, du courage et de la ténacité que vous avez montrés au cours de ces quarante cinq années données à l’Afrique ; si je suis heureux de vous remettre aujourd’hui cette distinction, c’est aussi parce que ces belles qualités, ce dévouement, ce courage, cette ténacité, vous avez su les communiquer à ceux que vous avez formés, à ceux qui ce sont trouvés à vos cotés, et qui continuent aujourd’hui à œuvrer pour de meilleurs lendemains, au Congo et ailleurs.
Père Christian de La Bretesche, au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui me sont conférés, nous vous faisons Chevalier de la Légion d’Honneur. »
- Discours du Père Christian de la Bretesche a qui l’Ambassadeur vient de remettre les insignes de Chevalier de la Légion d’Honneur.
« Les Républiques décorent des combattants qui se sont bien battus, elles ne décorent pas toujours des vainqueurs. Ce que nous fêtons ici ce soir grâce à l’amicale hospitalité de Monsieur l’Ambassadeur de France et de Madame Normand, ce qui est décoré ce n’est pas une victoire, c’est un combat.
Sur le chantier de l’insertion économique des jeunes par l’initiative économique et sociale, nous sommes des combattants nous ne sommes pas des vainqueurs. Nous vivons au coeur d’un drame qui sera peut-être le plus dramatique de notre nouveau siècle. Nous portons dans nos coeurs l’angoisse de milliers de jeunes dont l’avenir est en panne. C’est le drame de tout un Continent, un drame dont nous savons que par nature il peut dégénérer et il dégénère en tragédies sanglantes. Nous l’avons vécu, nous avons été blessés et nous ne sommes pas encore vraiment guéris de nos blessures. Mais nous poursuivons de notre mieux ce combat contre la pauvreté et contre le désespoir des jeunes qui n’ont pas de chemins. Dans ce combat il y a une nouveauté à l’émergence de laquelle nous travaillons de puis vingt ans et c’est cette nouveauté là que nous voudrions décorer ce soir.
Sur les chantiers de la construction nationale sur lesquels nous nous retrouvons les uns et les autres on peut nous classer en trois catégories d’acteurs: les politiques, les fonctionnaires, les citoyens porteurs d’initiatives économiques et sociales (la société civile sans exclusives au sens le plus large).
Comme il est de coutume en humanité quand il y a plusieurs catégories, chacun nourrit au sein de celle à laquelle il pense appartenir les préjugés les plus tenaces à l’encontre de toutes les autres.
Les politiques se plaignent des fonctionnaires et réciproquement. Fonctionnaires et politiques se méfient des citoyens trop organisés, et porteurs de trop d’initiatives.
Ainsi va l’humaine nature. Or il est grand temps pour nous ici en République du Congo de découvrir, que nous avons tous le plus grand et le plus urgent besoin les uns des autres, car les vrais politiques sont en toute hypothèse en charge de notre avenir commun et les fonctionnaires en charge de la cohérence de notre présent (il est difficile d’avancer dans le chaos). Tandis que nous; les citoyens porteurs d’initiatives économiques et sociales nous sommes la principale ressource nationale. Une ressource qui ne s’épuise que lorsqu’on s’obstine à ne pas s’en servir et en l’absence de laquelle il n’y aurait pas grand chose à administrer par les fonctionnaires ni même d’avenir à prévoir par les politiques.
En réalité la société dans sa complexité étant un organisme vivant, ces catégories d’acteurs s’interpénètrent évidemment et heureusement en profondeur. Il ne faut les distinguer que pour mieux les unir .Certains politiques sont heureusement très administratifs, certains hauts fonctionnaires sont utilement très politiques au meilleur sens du terme et les citoyens porteurs d’initiative que nous sommes sont des apporteurs de contenus très indispensables à l’élaboration et à la mise en oeuvre des politiques publiques.
Notre réalité à nous ici en République du Congo, c’est que au delà de la colonisation et au delà de l’expérience que nous avons faite du centralisme démocratique durant trois décennies, la présence sur les chantiers de la construction nationale de cette pluralité d’acteurs implique une mutation culturelle majeure, mutation de notre gouvernance, mutation dont nous sommes ici les uns et les autres les pionniers, chacune et chacun dans sa catégorie.
J’entends dire parfois que lorsque les jeunes se sont réunis au Forum il y a vingt ans pour poser les problèmes de leur avenir ils ont été contraints à l’époque de se substituer à la défaillance de l’Etat qui se trouvait en effet dans l’impossibilité de leur procurer un emploi et de leur proposer un avenir. On disait à l’époque qu’ils étaient remis à la disposition de leur famille.
J’ai toujours pensé que cette manière de présenter les choses était inadéquate. Les initiatives des citoyens d’un pays ne sont pas des substituts à celles que l’Etat serait sensé prendre à leur place. Selon le principe de subsidiarité ce serait plutôt le contraire qu’il faudrait affirmer. Les jeunes qui m’ ont embarqué il y a vingt ans dans l’aventure du « Forum » ont pris conscience de leur propres défaillances et ils ont décidé de prendre des responsabilités qui étaient les leurs et qui demeurent les leurs en leur âge mur. Personne ne pouvait et ne pourra jamais les prendre à leur place. Entrepreneurs ou chômeurs, ils ont choisi.
Il est dans la nature et le bon ordre des choses qu’à l’heure où l’Etat inscrit dans la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, le développement et la diversification des initiatives productives de base il trouve en face de lui des acteurs économiques professionnels organisés porteurs de leurs propres initiatives et porteurs des problèmes qu’ils ont à surmonter pour se positionner durablement sur de véritables axes de progrès économiques et sociaux.
Le « Forum », la CAPPED, la Thébaïde, Médecins d’Afrique, Viluka, l’Association des spiritains du Congo, le Comptoir Juridique Junior ont aujourd’hui dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et dans celui de l’émergence d’une société civile dans notre pays un seuil décisif à franchir. Nos structures ne peuvent pas du tout se permettre de régresser. Elles doivent décoller ou disparaître. Elles ne le pourront que dans le cadre de vrais partenariats avec les pouvoirs publics et les bailleurs de fonds. Or être partenaire ce n’est pas seulement partager des ressources, c’est aussi et surtout prendre le temps de s’asseoir et de réfléchir ensemble à ce que l’on veut faire.
Nous avons souhaité cette décoration qui nous était proposée par des gens qui nous veulent du bien pour nous la partager. Monsieur l’Ambassadeur vous avez décoré ce soir le Forum, la Thébaïde, Médecins d’Afrique, Viluka, le Comptoire Jurtidique Junior, l’Association des spiritains du Congo. Vous n’avez pas décoré leur victoire mais leur combat. Et je remercie du fond du coeur tous ceux qui nous ont fait l’amitié de rehausser de leur présence cette remise de médaille. »
Les amis du Père christian, après la cérémonie, à la Case De Gaulle.
Le lendemain de la cérémonie, on fête la médaille au Forum des Jeunes Entreprises !
3 jours plus tard, on fête la médaille à La Thébaïde, à Pointe Noire (Rivière Rouge) !
Merci pour cette information tellement réjouissante en dépit des tornades politiques, économiques, sociales qui ne cessent d’écorcher ce peuple. Et merci à Christian pour son discours courageux, réaliste ; pour le report qu’il fait de cette distinction sur ses compagnons de combat et leurs associations. Tout cela contribue à nous maintenir dans l’espérance.
Merci, Yves d’avoir transmis les discours!
Cela m’a fait revivre des moments forts que je suis heureuse d’avoir partagés avec vous.
Tant de rencontres et d’échanges vécus avec tous ceux qui font partie de la vie de Christian au Congo.
Je me considère privilégiée d’avoir pu vous accompagner.
Merci à toi, Christian de nous avoir permis de vivre pendant quelques jours la réalité de la vie là-bas, de nous avoir fait connaître toutes ces personnes qui oeuvrent pour leur pays.
J’y pense souvent et ils resteront très vivaces dans les récits qu’on me demande de faire sur notre voyage.
Beaucoup de personnes ont été heureuses d’avoir de tes nouvelles et très impressionnées par la remise de la décoration ,pour laquelle ils te félicitent chaleureusement. Donc reçois par mon intermédiaire leur affection et leurs félicitations.
J’espère que ta réunion sur le Forum s’est déroulée de manière satisfaisante Christian ,et que ton retour à la Thébaîde s’est bien passé.
Remercie encore tous de leur accueil.
Merci d’avoir consacré tant de temps à partager tes réalisations et tes pensées avec nous.
Il est désormais plus facile pour moi de mettre des images sur des noms ou des lieux.
J’espère ,mes neveux ,que votre retour a été « smooth « et que les mails n’encombraient pas trop l’ordi!
Mille mercis à tous trois pour ce que chacun m’a appris ou apporté et mille pensées affectueuses
de Caroline.
Cher Père Christian,
avec tous vos amis au Congo et en France je me réjouis de cette marque de reconnaissance qui vous a été bien légitimement décernée ; dans votre discours, vous partagez cette distinction avec les structures de la société civile que vous avez fait émerger et dont vous avez porté le développement ; j’y retrouve cet « esprit Forum » que, en tant que partenaire, je suis fier de partager avec vous-même et vos collaborateurs ; cette décoration arrive au moment où, grâce à l’appui financier d’un donateur français, vous réalisez enfin ce projet de salle polyvalente à La Thébaïde, projet dont je connais toute l’importance que vous y attachez ; il permettra le rayonnement de ces valeurs qui transparaissent dans votre discours et il contribuera à la prise en charge, par les individus eux-mêmes, de leur destinée avec, pour y parvenir, l’appui indispensable que vous leur proposez au centre de ressources de la Thébaïde.
Père Christian je m’associe à la joie de toutes et de tous dans ce grand moment.
Hubert
Quelle joie de savoir le combat du père Christian pour nous reconnu à ce point par la France!
Pourtant, ma joie sera plus grande le jour que notre propre pays, le Congo (Brazzaville), percevra le message ici réaffirmé par tata Christian de la Bretesche.
Pour ma part, je veille à ne pas oublier ce que j´ai appris en ayant observé de loin l´action de cet homme. La méditation de ses homélies et autres commentaires dans La Semaine Africaine des années 80-90 et après la guerre de 1997 a éclairé ma vie et mon action. Mon pays gagnerait à écouter cet homme. Détient-il l´un des secrets de notre développement? Je n´en doute pas. Je suis fier de lui.
Comme on dirait au Congo: « MERCI, TATA! QUE TON SEIGNEUR RENOUVELLE TES FORCES ET T´ACCORDE LA SANTÉ! »
Quelle joie de savoir le combat du père Christian pour nous reconnu à ce point par la France!
Pourtant, ma joie sera plus grande le jour que notre propre pays, le Congo (Brazzaville), percevra le message ici réaffirmé par tata Christian de la Bretesche.
Pour ma part, je veille à ne pas oublier ce que j´ai appris en ayant observé de loin l´action de cet homme. La méditation de ses homélies et autres commentaires dans La Semaine Africaine des années 80-90 et après la guerre de 1997 a éclairé ma vie et mon action. Mon pays gagnerait à écouter cet homme. Détient-il l´un des secrets de notre développement? Je n´en doute pas. Je suis fier de lui.
Comme on dirait au Congo: « MERCI, TATA! QUE TON SEIGNEUR RENOUVELLE TES FORCES ET T´ACCORDE LA SANTÉ! »